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Christine MIRABEL-SARRON

"Transmettre avant tout"


Dynamique, passionnée par l’idée de comprendre comment tout fonctionne, Christine MIRABEL-SARRON déploie son énergie au service de la psychologie et la psychiatrie. Son parcours, loin d’être tout rose, est un modèle de résilience et de réussite. Portrait.

Active. C’est le mot qui pourrait caractériser Christine Mirabel-Sarron, psychiatre et psychothérapeute. Rien que dans la façon de s’exprimer, on sent toute l’ébullition.

Déjà petite, elle ne tient pas en place : « Je fais plein d’activités, de la musique, de la danse, du yoga, beaucoup de sport… ». Elle est insatiable. C’est certainement l’une des raisons pour lesquelles elle adore l’école, notamment à partir du collège, et encore davantage au lycée. « Je me pose plein de questions, j’adore découvrir de nouvelles choses et je suis nourrie par la SVT et la physique au lycée. Ce qui m’intéresse c’est de comprendre comment tout fonctionne ». Les fondations sont là. Dès la 1ère, Christine sait qu’elle veut faire de la recherche. Mais les conseillers d’orientation la découragent, prétextant un niveau en mathématiques insuffisant… Pourtant, elle se lance dans des études de médecine !

« J’adore ! Je suis passionnée, et c’est d’ailleurs toujours le cas 40 ans plus tard », s’enthousiasme-t-elle. En dernier année de médecine, Christine est victime d’un grave accident de la route dans lequel elle perd la vue. Pendant un an, elle se rétablit et se demande ce qu’elle va faire. La recherche n’est plus possible du fait de sa cécité… Alors vers quoi se tourner ?

« Les TCC, c’est génial ! »

Elle opte pour la psychiatrie ! Il faut dire qu’avant de quitter la médecine de soins, elle a fait un stage dans ce domaine. Pourquoi ? Parce qu’elle veut comprendre ce qu’il se passe dans les cerveaux malades. Elle apprécie beaucoup son expérience et son responsable lui glisse qu’elle est douée pour ce métier. Elle choisit donc d’y retourner. Mais voilà, le doyen de la faculté émet des réticences quant à son handicap… La vie lui met encore des bâtons dans les roues. Qu’importe ! Sa détermination la porte et elle reçoit l’aide du professeur DENIKER qui finit par persuader le doyen : « grâce à lui je peux m’inscrire dans la spécialité de psychiatrie ». C’est là qu’elle découvre les TCC.

Elle a la chance de rencontrer Méliné AGATHON, psychologue au CNRS, qui est celle qui introduit les TCC en France avec le Dr ROGNAN, psychiatre militaire. « J’arrive dans le service et elle organise un séminaire de formation sur les TCC. C’est une grande découverte ! J’y retrouve la fibre « recherche » et elle nous explique tout ce qui concerne le conditionnement, comment on le démonte…etc. On peut mesurer, évaluer, expliquer les fonctionnements… C’est génial » raconte-t-elle.

Après ses études de psychiatrie, cette insatiable poursuit son cursus en rejoignant la fac de psychologie car elle veut comprendre comment fonctionne le cerveau normal. Master, doctorat… Elle enrichit encore ses connaissances.

« Personne ne voudra de vous ! »

Son internat s’est joué de peu étant donné les réticences du doyen. Elle comprend que son handicap va rendre les choses plus difficiles… Elle contacte des associations et le président de l’une d’elle va lui délivrer un sésame : « Personne ne voudra de vous ! Soit, vous êtes major, soit, rien ». Ce discours ne fait pas partie de son éducation. Elle n’a jamais eu cette préoccupation. Et là, tout à coup, être la meilleure va devenir sa priorité. Alors elle s’y attelle et y parvient. Elle passe le concours de cheffe de service adjointe en 1992, l’obtient et s’entend dire par le directeur « si j’avais eu le choix, j’aurais pris quelqu’un d’autre ». On ne lui épargne rien. Mais elle franchit un à un tous les obstacles et dirige une unité de psychothérapie, qui devient un service à part entière comme il y en a peu en France. C’est l’eldorado !  « J’ai adoré diriger un service à l’hôpital car j’avais carte blanche et j’innovais. Tout le monde m’a suivie ! C’était passionnant ! » Elle et ses équipes rédigent de nombreuses publications, leurs travaux sont soulignés dans des congrès internationaux. « Ma plus grande victoire c’est de me dire que les TCC marchent et ô combien ! On a rendu accessible des méthodes auprès de beaucoup de thérapeutes. On a contribué à soulager de nombreux patients. C’est génial ! »

Transmettre le savoir et le savoir-faire

Car ce qui porte Christine, c’est vraiment la transmission d’un savoir : « J’aime rendre accessible le soin de psychothérapie. Et apporter en France les nouvelles approches thérapeutiques qui ont montré leur efficacité à l’étranger» Elle parcourt le monde à la recherche de pratiques qui font leurs preuves pour les diffuser au plus grand nombre. Elle se forme, puis délivre son savoir à ses équipes, à ses étudiants et aux autres thérapeutes en publiant de nombreux livres. « J’aime transmettre le savoir et le savoir-faire. Le problème c’est que le savoir est surtout en anglais ! Ça demande un effort de s’y plonger. Alors je le fais et si je peux partager tant mieux ! »

Ce cercle vertueux l’amène à créer le DU de TCC à l’université Paris 5 en 1991. Et ce n’est pas tout ! Entre deux phrases rapidement prononcées, Christine glisse qu’elle a reçu la légion d’honneur pour avoir rendu accessible les TCC dans leur forme innovante et efficace.

Quoi de plus logique alors que de prendre la présidence de l’AFTCC à une période de sa vie ?

En 2002, on lui propose de se présenter. Elle connait bien l’asso puisqu’elle fait partie du CA. « Jamais ça ne me serait venue à l’idée ! Je suis plutôt l’ouvrière qui met les mains dans le cambouis plutôt qu’une personne qui cherche la lumière. » Mais elle accepte et se donne à fond comme dans tout ce qu’elle entreprend. Ses chantiers principaux ? Le site internet, l'organisation du congrès européen de TCC, le congrès EABCT à Paris en 2006 et la mise en place du premier GIE sur la dépression. D’autres suivront très rapidement sur l’affirmation de soi ou encore sur les enfants. Une manière encore de transmettre des savoirs, de les diffuser au plus grand nombre, elle qui a intrinsèquement l’amour de l’humain.